Violences sexistes et sexuelles sous relation d'autorité ou de pouvoir
Agir contre ce fléau trop longtemps ignoré
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La Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof) a remis le lundi 18 novembre 2024 au Gouvernement un rapport sur les violences sexistes et sexuelles sous relation d’autorité et de pouvoir. Fruit de six mois de travail et de 70 auditions, il illustre la persistance de faits de ce type dans l’ensemble de la société, dès lors que se nouent des relations de pouvoir, d’autorité ou de subordination. On retrouve de telles violences dans de nombreuses situations professionnelles mais aussi d’autres contextes étudiés par le rapport : associations, partis politiques, univers de la culture, du sport, de la santé…
Des enjeux particuliers au travail
Alors que plus d’1,4 million de femmes a déclaré avoir subi des violences sexistes et sexuelles (VSS) hors cadre familial en 2021, et que seules 2 % d’entre elles ont donné lieu à un dépôt de plainte, le rapport dénonce le poids, en France, d’un sexisme ordinaire favorisant ces violences dans une logique de continuum.
Il met également à jour les mécanismes par lesquels l’existence d’une relation d’autorité, reconnue par la loi comme caractère aggravant en cas de condamnation, peut créer une situation propice pour ces violences dont la probabilité augmente en raison d’autres facteurs tels que :
- la situation de précarité des victimes (contrat à durée déterminée, situation d’intérim ou d’apprentissage…),
- la présence d’autres risques psycho-sociaux identifiés dans l’entreprise,
- les horaires atypiques, en particulier le travail de nuit,
- la faible mixité des effectifs…
Le rapport présente par conséquent l’amélioration des conditions de travail des femmes, notamment à travers une progression de la parité et de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, comme un objectif bien souvent préalable à la lutte contre les VSS et souligne les améliorations qu’a permises la mise en œuvre de l’index de l’égalité professionnelle femmes-hommes.
Les autrices montrent plus généralement comment le travail peut s’avérer un cadre protecteur pour les femmes. L’obligation de sécurité qui incombe à tout employeur implique la protection du personnel contre toute forme de violence, y compris les VSS, indépendamment des procédures pénales éventuelles. Dans les entreprises de plus de 11 salariés, il est accompagné du comité social et économique (CSE) disposant lui-même, dans les entreprises d’au moins 300 salariés d’une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) comprenant un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes.
Le rapport s’appuie sur une étude d’Ekilibre Conseil montrant que les victimes de VSS au travail considèrent leurs collègues comme « les alliés les plus efficaces face aux actes sexistes ». « Cette solidarité interne est essentielle, bien qu’il reste encore beaucoup à faire pour éradiquer complètement le sexisme au travail », précise l’étude.
15 recommandations pour lutter contre ces violences
Afin d’amplifier la lutte contre ces violences, le rapport formule 15 recommandations touchant l’ensemble des situations engendrant des violences sexistes et sexuelles dans un contexte d’autorité. Plusieurs d’entre elles touchent tout particulièrement le monde de l’entreprise :
Prévenir les violences
- Extension de la conditionnalité des aides publiques à la mise en œuvre effective de mesures de prévention des violences sexistes et sexuelles (formation, communication…) ;
- Création d’un label Agir contre les violences sexistes et sexuelles pour distinguer les structures qui mettent en œuvre des outils de formation et de prévention adaptés ;
- Désignation d’un organisme indépendant pour certifier et contrôler les organismes de formation sur les violences sexistes et sexuelles et ceux réalisant les enquêtes internes ;
- Education aux violences sexistes et sexuelles, sous leurs différentes formes (définition des rapports de pouvoir, sensibilisation aux risques de l’emprise…) notamment lors de formations diplômantes, à l’entrée dans l’emploi ou dans le cadre du service national universel ;
- Mise en œuvre de formations obligatoires pour toutes les personnes en position d’autorité ou de responsabilité et tous les professionnels intervenant dans la prise en charge des cas de violences sexistes et sexuelles ;
- Pérennisation des enquêtes de victimation en lien avec ces violences ;
- Evaluation de la loi Rixain du 24 décembre 2021 relative aux grandes entreprises et la loi du 19 juillet 2023 relative à la fonction publique pour atteindre l’objectif d’égalité fixé dans les instances dirigeantes et exécutives et dans les instances disciplinaires.
Repérer
- Généralisation des structures d’écoute et de signalement, en garantissant leur compétence et leur indépendance.
Sanctionner
- Mise en place d’ordonnances de protection pour les violences sexistes et sexuelles y compris hors cadre conjugal ;
- Incitation et accompagnement renforcé des organisations pour la réalisation d’enquêtes internes et la mise en œuvre de sanctions disciplinaires, équitables, rapides et dissuasives, sans attendre l’issue des procédures judiciaires ;
- Expérimentation dans les juridictions de pôles spécialisés sur les violences sexistes et sexuelles dans le cadre de relations de travail, qui confèrent au juge des compétences tant pénales que prud’homales.
Accompagner et réparer
- Octroi de l’aide juridictionnelle dès le dépôt de plainte ;
- Formation des experts judiciaires psychologues ou psychiatres à l’évaluation des conséquences physiques et psychologiques des violences sexistes et sexuelles et augmentation du nombre de spécialistes de cette problématique ;
- Amélioration de la prise en charge par les assurances ou les mutuelles des frais liés aux actions judiciaires et aux soins des victimes de violences sexistes ou sexuelles.
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